Votre salarié exerce plusieurs emplois, quels sont les points de vigilance pour ne pas tomber sous le coup d’une situation illicite ?

En principe, un salarié peut cumuler plusieurs emplois sauf clause contractuelle d’exclusivité. Il doit faire preuve de loyauté envers ses employeurs en n’exerçant pas d’activités concurrentes.

Dans le cadre de ce cumul d’emplois, il est nécessaire de veiller au respect des durées maximales quotidiennes et hebdomadaires de travail qui sont d’ordre public !

En effet, “aucun salarié ne peut accomplir des travaux rémunérés au-delà de la durée maximale du travail, telle qu’elle ressort des dispositions légales de sa profession” (article L.8261-1 CT).

Que faire en cas de dépassement des limites ?

Si votre salarié cumulant plusieurs emplois est amené à dépasser ces durées maximales, vous devez lui demander de choisir l’emploi qu’il souhaite conserver, en lui accordant un délai de réflexion suffisant (Cass. soc. 9 déc. 1998 n° 96-41.911).
 
Un refus du salarié de régulariser sa situation ou de fournir à l’employeur les documents lui permettant de vérifier le volume de ses activités peut constituer une faute grave (Cass. soc. 20 juin 2018 n° 16-21.811 ; Cass. soc. 19 mai 2010 n° 09-40.923).

La Cour de cassation vient de juger (Cass. soc. 19 avril 2023, n°21-24.238) que la seule circonstance que, du fait d’un cumul d’emplois, un salarié dépasse la durée maximale d’emploi, ne constitue pas en soi une cause de licenciement.

Les faits

L’avis des juges

L’avis de la cour d’appel :

La cour d’appel ne retient pas la faute grave et requalifie le licenciement en un licenciement pour cause réelle et sérieuse.
Les juges d’appel avaient pourtant caractérisé le comportement fautif du salarié en relevant que ce dernier avait « travaillé pour un autre employeur en 2017 sans informer préalablement la société de l’accomplissement de ce second emploi, ce qui a eu pour effet un non-respect des durées maximales de travail et une violation de l’obligation de sécurité faisant courir des risques aux autres salariés de l’entreprise, peu important que cette situation de cumul irrégulier ait disparu au jour du licenciement et que l’employeur ne l’ait pas mis en demeure de choisir l’emploi qu’il souhaitait conserver comme invoqué par le salarié ».

L’avis de la Cour de cassation :

La Haute juridiction n’est pas du même avis. Elle souligne que dans cette affaire :

  • Le salarié avait rempli une attestation de double emploi en mars 2018, en présence de l’employeur ;
  • Le salarié avait également renseigné des demandes d’autorisation accordées par l’employeur dès le mois de mars 2018.

Dans ces conditions, le salarié avait donc transmis les éléments permettant à son employeur de vérifier le respect des durées maximales de travail.
En outre, le cumul irrégulier avait disparu au jour du licenciement, la Cour relève la disparition du fait fautif à la date du licenciement.

Notre analyse

  • Même si le cumul d’emplois entraine un dépassement de la durée maximale légale du travail, le simple fait que le salarié ait transmis à son employeur les éléments le mettant en mesure de vérifier le respect des durées maximales, empêche l’employeur d’invoquer la faute grave.
  • Plus encore, en dépit de l’obligation de sécurité et des risques auxquels les autres salariés pouvaient être exposés, ce seul dépassement de la durée maximale du travail ne constitue pas en soi une cause de licenciement.
  • Seul le refus du salarié de régulariser sa situation ou de transmettre les éléments à son employeur afin de le mettre en mesure de vérifier le respect de ces durées maximales peut constituer une faute.

Il est donc essentiel d’être vigilant à toute situation de cumul d’emplois par vos salariés, et d’autant plus au regard de votre obligation de sécurité.

Comment faire face à ce type de situation en pratique ?