En contentieux, nous sommes trop souvent confrontés à des licenciements pour insuffisance professionnelle contestés sur la base de comptes-rendus d’entretien annuel d’évaluation dithyrambiques ou à tout le moins neutres au cours de la collaboration. 
Difficile alors de plaider l’insatisfaction de l’employeur et encore moins les alertes préalables de celui-ci pour justifier le licenciement intervenu postérieurement. 
Aussi, les managers sont sensibilisés pour retranscrire leur insatisfaction dans ces comptes-rendus.

  • Mais attention à la rédaction de cette insatisfaction !

    Elle ne doit pas caractériser une sanction disciplinaire. A défaut, le licenciement qui s’en suivra sera invalidé.

Explications

Rappel des fondamentaux du droit disciplinaire

Définition de la sanction disciplinaire : toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. 
Principe non bis in idem : une même faute, ou un ensemble de faits fautifs dont l’employeur a connaissance dans le même temps, ne peut pas faire l’objet de deux sanctions.  L’articulation de ces deux principes aboutit à ce toute remarque écrite adressée par un employeur à un salarié puisse aisément, en fonction des termes employés, être qualifiée d’avertissement. 
C’est ainsi le cas du compte-rendu d’entretien annuel d’évaluation écrit remis au salarié. 

Arrêt de la Chambre sociale du 2 février 2022 (n°20-13.833)

Les faits :

  • La solution :

    Le compte-rendu écrit d’entretien d’évaluation comportant des griefs précis reprochés au salarié et lui enjoignant de modifier son comportement constitue un avertissement épuisant le pouvoir disciplinaire de l’employeur.

Cette solution n’est pas étonnante : la Chambre sociale avait déjà requalifié un courriel adressé par l’employeur à un salarié dans lequel était dressé la liste de ses reproches à son encontre et l’invitait de façon impérative à un changement radical de comportement (Cass. Soc ; 26 mai 2010, n°08-42.893 et Cass. Soc. ; 9 avril 2014, n°13-10.939). 

En revanche, la Cour de cassation a pu préciser qu’un compte rendu d’entretien faisant état de manquements constatés et aux termes duquel son auteur précise qu’il entend demander une sanction ne caractérise par un avertissement (Cass. Soc. ; 27 mai 2021, n°19-15.507).

En résumé : le compte rendu d’entretien d’évaluation doit se limiter à retranscrire les constats du manager, les éventuels manquements, reproches ou insatisfactions à l’égard du salarié. Autrement dit, il doit évaluer le salarié.

En aucun cas, le compte rendu d’évaluation ne doit tirer des conséquences de ces constats. Les conséquences de tels constats seront à traiter dans le cadre d’une procédure disciplinaire.