La Cour de cassation dans un arrêt du 8 mars 2023 (Cass. Soc. 8 mars 2023, 21-12.492), vient répondre par la négative en apportant des limites, notamment en matière d’inégalité de traitement.  
En effet, elle retient que pour établir une inégalité de traitement, une salariée peut valablement obtenir communication des bulletins de paie anonymisés de collègues.

Les faits

L’employeur invoque l’atteinte au droit à la vie privée et forme un pourvoi en cassation.

L’avis de la Cour de cassation

La Cour de cassation se fonde sur le caractère non absolu du droit à la protection des données pour faire primer le droit à la preuve. En effet, elle précise que :

  • « le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu et doit être considéré par rapport à sa fonction dans la société et être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux, conformément au principe de proportionnalité » ;
  • le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.

Dans cette affaire, la communication des bulletins de salaire était nécessaire et proportionnée au but recherché car elle permettait d’établir ou non l’inégalité de traitement invoquée par la salariée.
Les juges encadrent également cette communication en demandant à ne laisser visibles que les données personnelles nécessaires à la résolution du litige.
En effet, un bulletin de salaire peut contenir des données personnelles sensibles telles que l’adresse ou encore le numéro de sécurité sociale.

Une décision similaire avait été rendue en matière de discrimination. En effet la Cour avait indiqué que l’article 145 du Code de procédure civile pouvait être utilisé pour rechercher des moyens de preuve servant à établir la discrimination (Cass. Soc. 22 septembre 2021, n°19-26.144).

Notre analyse

Cette décision illustre la nécessité de trouver un juste équilibre entre le droit à la preuve et le droit à la protection des données personnelles des individus.