Vous envisagez de verser un supplément d’intéressement ou de participation à vos salariés, quelles formalités devez-vous observer afin de ne pas tomber sous le coup d’un redressement URSSAF ?

La Cour de cassation, par une récente décision (Cass. Civ. 2ème, 19 octobre 2023, n°21-10.221) qui ne manque pas de surprendre se prononce sur le formalisme à respecter afin que les suppléments d’intéressement et de participation puissent prétendre à une exonération de cotisations sociales.

Quel est le régime juridique des suppléments de participation et d’intéressement ?

Il semblait résulter de ces dispositions, que l’accord spécifique n’était pas obligatoiresauf si l’employeur souhaitait répartir le supplément d’intéressement ou de participation selon des modalités différentes de celles prévues par l’accord d’intéressement ou de participation.

Telle est d’ailleurs la position de l’administration dans la fiche n° 8 du dossier « intéressement » et la fiche n°7 du dossier « participation » de son Guide de l’épargne salariale :

  • A propos du supplément d’intéressement « champ de l’accord spécifique est strictement limité à la répartition du supplément, si et seulement si cette répartition est différente de l’accord d’intéressement».
  • A propos du supplément de participation : « L’entreprise dispose de deux possibilités de répartition, après avoir déterminé le supplément « collectif » de participation qu’elle entend verser à ses salariés : – utiliser les règles fixées par l’accord de participation applicable à l’exercice considéré, dans le respect des plafonds collectif et individuel rappelés ci-dessus ; – conclure un accord spécifique pour la répartition du supplément ».

Les faits

Prétentions de la société :

  • D’une part, la négociation annuelle sur le salaire et le partage comporte des dispositions relatives aux suppléments  et cet accord d’entreprise a été déposé auprès de la Direccte.
    Or, ces accords prévoyaient des suppléments dans les conditions de répartition prévues par les accords d’intéressement et de participation d’origine, de sorte qu’il n’était pas nécessaire de conclure un accord spécifique.
  • D’autre part, ces protocoles d’accords liés aux NAO sur les salaires pouvaient être assimilés à des accords spécifiques.

Arguments de l’URSSAF :

  • Les suppléments d’intéressement et de participation n’ont pas fait l’objet d’un accord spécifique ou d’un avenant à l’accord initial déposé suivant les modalités exigées.
  • Le fait que des protocoles d’accords de négociations annuelles incluent des dispositions relatives à la participation ne suffit pas à établir que les participations auraient fait l’objet d’un accord spécifique ou d’un avenant à l’accord initial déposé suivant les modalités exigées.

L’avis de la Cour de cassation

Se fondant sur les articles L.3324-9 et L.3314-10 du Code du travail, la Cour de cassation considère que « lorsque l’augmentation de la réserve spéciale de participation est négociée par la voie collective, le supplément de participation doit faire l’objet d’un accord spécifique prévoyant les modalités de répartition entre les salariés. Pour ouvrir droit à exonération, cet accord spécifique doit avoir été déposé à la DIRECCTE du lieu où il a été conclu ».

En outre, « lorsqu’un accord d’intéressement a été négocié dans l’entreprise, l’employeur ne peut mettre en oeuvre un supplément d’intéressement qu’en application d’un accord spécifique dont l’objet est de prévoir les modalités de répartition du supplément d’intéressement. Pour ouvrir droit à exonération, cet accord spécifique doit avoir été déposé à la DIRECCTE du lieu où il a été conclu ».

Quels enseignements en tirer ?

Nos préconisations

Dans l’attente d’éventuelles précisions sur la portée de cette décision, deux alternatives sécurisantes peuvent s’envisager :

  • Avant de décider de la mise en place d’un supplément d’intéressement ou de participation, interroger l’URSSAF en mobilisant le rescrit social afin qu’elle prenne position. En effet, la décision du rescrit est opposable pour l’avenir à l’URSSAF tant que la situation de fait exposée dans la demande du cotisant, ou la législation au regard de laquelle la situation a été appréciée n’ont pas été modifiées.
  • Conclure et déposer systématiquement un accord spécifique dans les conditions prévues afin de mettre en place un supplément d’intéressement ou de participation