La Cour de cassation juge de manière constante que l’article L. 3261-2 du Code du travail impose aux employeurs la prise en charge partielle du prix des titres d’abonnement en transport en commun souscrits par leurs salariés pour effectuer leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail. (Cass. soc. 12 déc. 2012 n° 11-25.089 ; Cass. soc. 12 nov. 2020 n° 19-14.818).
Ce principe est d’ailleurs repris dans le BOSS, dans la partie relative aux frais professionnels (§ 530).

Ainsi et sous ce couvert, le Tribunal judiciaire de Paris a eu à juger dans une décision du 5 juillet dernier que l’employeur ne pouvait pas conditionner « le remboursement des frais de transport en commun à un critère d’éloignement géographique (inférieurs à 4h par jour A/R)».
A défaut cela serait méconnaître les dispositions légales des articles L. 3261-2 et R. 3261-1 du code du travail.TJ Paris, 5 juillet 2022, n°22/04735

Les faits

Dans la présente affaire, il s’agissait d’une société qui avait conditionné le remboursement du coût des abonnements de transport public souscrits par les salariés à un critère d’éloignement géographique, soulignant qu’il était en droit de limiter cette prise en charge au regard notamment  :

  • de l’application de l’accord télétravail qui ne prévoyait pas de jours fixes et permettait aux managers de demander à ses équipes de venir sur site quand cela était nécessaire ;
  • du fait que la direction n’était pas favorable au remboursement des déplacements des salariés ayant décidé de façon unilatérale de s’installer loin de Paris et ainsi de bénéficier des coûts de la vie inférieure à ceux constatés en Île-de-France.

L’avis du Tribunal judiciaire

Le Tribunal judiciaire n’a pas suivi ce raisonnement et a considéré au regard de la jurisprudence précitée que le seul critère déterminant de la prise en charge des frais de transport est celui de la résidence habituelle des salariés, celui-ci étant apprécié souverainement par les juges du fond, et que la condition instaurée par l’employeur dans cette affaire venait en contradiction des obligations légales résultant des articles L. 3261-2 et R. 3261-1 du Code du travail.

Le Tribunal a ajouté que l’employeur a ainsi institué une différence de traitement entre les salariés.

En synthèse

L’employeur doit prendre partiellement en charge le prix des titres d’abonnement en transport en commun souscrits par les salariés pour effectuer le trajet domicile – lieu de travail, peu important la distance géographique.

Le libre choix du domicile par le salarié

L’employeur ne peut pas imposer au salarié le lieu de son domicile, celui-ci disposant de la liberté de choisir son domicile conformément aux dispositions de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme (Cass. soc. 28 fév. 2012, n°10-18.308).

Cependant, dans une décision d’espèce, les juges ont validé le licenciement notifié en raison de la distance excessive entre le nouveau domicile du salarié, dont il n’avait pas informé son employeur, et son lieu de travail, au motif pris que le licenciement avait été prononcé en application de l’obligation de sécurité à la charge de l’employeur (CA Versailles, 10 mars 2022 n°20/02208).

Sans nul doute que la question du libre choix du domicile, liberté fondamentale par excellence du salarié, fera l’objet de précisions jurisprudentielles dans les mois à venir compte tenu de l’impact de la généralisation du télétravail…
Espérons que ces précisions ne donneront pas la chair de poule aux employeurs !
A suivre donc…